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- Epilogue -

 

Il n’y eut pas grande différence à s’habituer aux ombres, la chandelle était si ténue.

Et pourtant ce fut l’entrée dans un tout autre monde.

Oscar manqua une respiration, puis deux, comme si le fait de retenir son souffle allait lui permettre d’entendre les battements de cœur de son compagnon. Il avait gardé son poste d’observation, c’est-à dire au-dessus d’elle en appui sur son avant-bras.

Etait-il aussi troublé qu’elle-même ?

Non, pas troublé. Mauvais mot. Incandescent : voilà.

 

- Embrasse-moi encore, finit par chuchoter Oscar au bout de quelques secondes.

- Non.

- Non ? Pourquoi ?

- « Si de ta vie tu répètes encore une fois pourquoi »…

- Je suis sérieuse. Cesse de me citer, même si j’étais d’une perspicacité admirable à ton sujet. Tu ne veux pas…faire comme à l’instant ?

- Bon sang, tu avais promis d’être sage !

- Et en quoi ma demande romprait cette promesse ?

- Déjà parce que tu bouges beaucoup trop…

- Comment cela, tu mens.

- Vérité. Tu peux me dire ce qu’est en train de faire ta main ?

- Oh…

 

Elle prit soudaine conscience de ses doigts jouant parmi les boucles brunes, dont la texture devait être à ce point soyeuse qu’elle répétait cette caresse encore, et encore.

 

- Oh, ça, admit-elle. C’est…pour mieux m’endormir, je crois.

- Vraiment ? Et je suppose que ta requête ne concerne qu’un baiser de bonne nuit, comme nous le donnait parfois Grand-Mère ?

- Là, non, j’admets en effet une petite entorse au principe . Mais cela peut contribuer tout de même à me faire passer une bonne nuit, sourit elle de manière radieuse.

- Tu es impossible.

- Mais attends…parlons un peu de toi, mon cher. Tu me jettes à la face des accusations infondées sans même voir tes propres fautes, qui sont autrement plus préoccupantes ! Puis-je aussi savoir ce que je sens toujours autour de ma taille, mmmh ?

- Rien.

- Ah non ! Un bras, peut-être…Ou bien alors, un enlacement de bonne nuit ?

- Pas du tout. Tu n’y es pas. C’est…en réalité j’ai une peur atroce du noir.

- Oh, oh. Je suis donc là pour te protéger de monstres sanguinaires tapis sous le lit, à moins qu’ils ne soient dans un des tiroirs du petit secrétaire, là-bas.

- Exactement.

- André…puis-je te dire quelque chose ?

- Je vois mal comment t’en empêcher, même si je suis pratiquement certain que cela ne va pas me plaire du tout.

- Tu me fais envie…

 

Elle le cueillit par surprise, ce qui n’était guère étonnant puisqu’elle le fut tout autant à l’énoncé de ses paroles. C’était un fait, pourtant. Ce visage qu’elle connaissait, était une découverte à ce point renouvelée qu’un méandre savant bataillait ferme dans son ventre. Soulignant sa sentence, ses doigts bifurquèrent sur la pommette diablement séduisante de son ami, la dessinèrent, avant de partir vers d’autres régions.

 

- Oscar…rugit-il tendrement.

- Tu as quantité de rides sur ton front lorsque tu es fâché…dit rêveusement la jeune fille.

- Arrête !

 

Cette fois immobilisée des deux poignets contre l’oreiller, Oscar attendit de la plus candide des façons qu’il reprenne ses esprits. Du moins elle le supposa, vu l’agitation de sa vaste poitrine pratiquement soudée à la sienne maintenant. Il la regarda. Entièrement, de ce quelque chose de diablement excitant dans l’œil. Une coulée de lave la secoua parce qu’il était le moins innocent du monde, quand il s’attardait plus que de raison sur ses jambes et sa hanche. L’autre était prisonnière de la sienne, à demi, elle-même protégée par les duvets de plumes fines. Et dessous, la nudité complète du jeune homme

Cette idée lui retourna de nouveau les sangs, et sans pouvoir se retenir vint déposer un léger baiser dans le cou masculin, si proche.

 

- C’est ainsi que tu comptes être sage ? la menaça t-il.

- Bien sûr. Je vais même recommencer, car je trouve ta peau très attirante. J’aime infiniment ton odeur…

- Oscar...gronda t-il d’une voix lascive quand elle recommença non pas une fois, mais trois.

- Embrasse-moi, et j’arrête…

- Du chantage, on aura tout vu ! Et dire que tu menaçais de me casser la figure il y a quelques heures à peine…Aïe !

- Je fais comme toi, je te mange, sourit-elle dans la chaleur de son cou. Et puis tu l’as mérité. Je te mords encore une fois si tu n…

- Attends un peu, espèce de militaire sanguinaire !

 

Il ne prit pas sa bouche, trouva bien mieux pour la punir de sa mutinerie : ses lèvres conquirent sa poitrine menue d’une ferveur adroite, guère gênées par le tissu de la camisole. Elle, si. Elle ne rêvait que de peaux nues, décidément…Tous ses sens s’aiguisaient, impérieux, simultanés ; la pression desserrée contre son poignet venue étreindre sa taille, le mouvement de ses propres hanches qui s’animaient. Et bon sang, celles d’André, si puissamment attirantes…

De sa main libre elle plongea dans les boucles brunes, le regard perdu au-delà du visible, souriante.

 

- Te décideras-tu à m’enlever ces stupides vêtements de femme ? Je les déteste.

- Moi aussi, haleta André entre deux baisers avides. Mais pas question.

- Quoi ?

- Tes seins sont trop tentants.

Première nouvelle ! Elle les avait toujours considérés comme un horrifiant encombrement, dès la puberté.

Il n’avait pas l’air du tout du même avis. La sensation était trop enivrante pour qu’elle reste inactive de toute façon.

- Alors c’est moi qui vais m’en charger, gémit-elle en crochetant l’ourlet de sa camisole.

- Non !

 

Dressé soudain, le cheveu ébouriffé abritant la clarté de son regard de forêt, Oscar songea à quelque entité tout droit sortie d’un conte païen. Plus tentant que jamais, en fait.

 

- Oscar…supplia t-il encore. Tu ne te rends pas compte…tu es…désirable comme il n’est pas permis, mais je ne peux faillir ! Je t’en prie, c’est à toi de partir de cette chambre…

- Pardon ?!

- Je…je suis comment dire…incapable de le faire, moi, pour une raison purement physiologique.

- Pardon ? Je ne comprends rien.

- Pensais-tu ne me faire aucun effet ?

- … ?

- Enfin, Oscar, tu as déjà assisté à la saillie d’un pur-sang, non ?

 

Le jour se fit dans son esprit. En effet, son père possédait l’une des plus belles races de chevaux d’exception de la région, il n’était pas rare qu’un noble friand de perfection amène une pouliche à féconder. A cette occasion, le mâle avait effectivement une réaction…enfin, sortait une fort conséquente…

 

- …oh !

 

Loin de la confondre, cette nouvelle réalité la fit rire de manière espiègle tout en fixant la « réaction » invisible à ses regards. Elle lui plaisait donc !

- Est-ce…douloureux ? ne put-elle s’empêcher de questionner.

- N…non, c’est…enfin oui, c’est…ce n’est pas le mot. Et…et puis là n’est pas le problème, il faut que tu t’en ailles, c’est tout.

- Pourquoi ?

Il leva les yeux au ciel, la respiration difficile

- « Pourquoi, pourquoi », encore ! Petite écervelée, parce que j’ai furieusement envie de te faire l’amour, voilà pourquoi.

- Et c’est grave… ?

- Mais…évidemment que c’est grave ! Où as-tu la tête ! Ton père, ta carrière, ta noblesse, tes…

 

Elle se dressa à son tour, impérieuse; à genoux devant André elle le toisa

 

- Et que t’importe mon père, sourit-elle. Ce n’est pas à lui que tu vas faire du bien…

- Oscar !

- André, ferme-la, c’est un ordre.

- Tu n’es qu’une fo…

 

Il ne put finir, mâchoire décrochée, quand elle fit passer d’un coup sec la camisole par-dessus tête. Sa poitrine ne devait pas être si horrifique, après tout. Elle perçut presque l’accès de fièvre qui prenait possession de son compagnon, à ne rien regarder d’autre. Profitant de l’effet de surprise – et pour cause -  elle le bascula sans sommation sur le dos et reprit ce qu’elle jugeait être son dû : sa bouche suave et caressante, qui ne put que répondre à son impérieux baiser.

Quelques secondes plus tard, elle acquiesçait en se redressant, admirative.

 

- C’est en effet…plutôt impressionnant.

 

Il mit du temps à comprendre. Par son sourire et sa position assise, en travers de son bassin, son érection ne pouvait effectivement plus lui apparaître comme une notion…abstraite.

Malgré la situation particulièrement excitante, il la menaça tout de même de son index. D’une voix, très, très voilée tout de même.

 

- Capitaine de Jarjayes, si tu ne t’en vas pas immédiatement de là…

- Que vas-tu faire ?

- …je n’en sais fichtre rien, mais je vais trouver.

- Moi je sais. Je vais venir tout contre toi…

- Pour dormir ? persifla t-il.

 

Elle se coula à ses côtés mieux qu’un serpent, et plongea ses yeux dans la verdure délicieusement troublée.

 

- Non, je n’ai guère envie de dormir pour tout t’avouer…murmura t-elle en lui caressant brièvement la joue.

Sa paume descendit.

- Tu n’es qu’une menteuse, sourit-il à son tour. Etre sage, je te jure…

- Comme si tu y avais crû un instant.

- Absolument. Je suis une âme pure.

- Ah ? souffla t-elle en repoussant doucement le duvet chaud. Explique-moi donc ce théorème, mon cher. Je n’ai pas précisément perçu la pureté de cristal dans tes yeux, sur ma poitrine.

- C’est parce que tu n’es guère habituée à ma nature angélique.

- Je te trouve outrageusement tentateur, en effet…

 

Il fut d’accord. Ou bien alors il n’écoutait pas, plus probablement.

Céleste, son sourire le fut complètement en tout cas, rejetant doucement son visage en arrière sous l’hommage très scandaleux fait à sa masculinité. Chavirée, Oscar dévorait des yeux chacune de ses réactions tandis qu’elle caressait son sexe dressé, la plus intense expérience de sa vie. Regarder ce phénomène, tout autant. Un besoin irrépressible lui fit quitter son poste d’observation, pour un autre, bien plus bas.

Il eut le souffle coupé lorsque la bouche remplaça l’effleurement de la main, son étonnement fut tel qu’il se contenta de l’observer un bref instant, la pupille dilatée, avant d’exhaler une tension indescriptible.

Elle avait ce pouvoir, sur lui ! Même ses propres pulsion la grisaient : rien n’était plus magnifique que ce morceau de chair dur, lisse, pulsant de vie, si prometteur. L'avoir contre ses lèvres devint un besoin.

Voilà tout ce qui le différenciait d'elle...plus deux ou trois autres choses évidemment ; même là il était superbe. Impressionnant Elle l'embrassa, exactement là, puis ici, encore...

 

- Je…je t’ai fait mal ? bégaya aussitôt la jeune fille, un peu rouge, quand il la reprit contre lui de manière brusque. Pardon, j’en avais envie, je ne savais p…

- Adorable folle !

 

Il musela ses excuses sur-le-champ d’un baiser qui n’eut d’autre conséquence que de souder leurs corps, bien trop intimement. Trop ?

 

- Je pense que nous sommes arrivés à l’irrémédiable, tu ne crois pas ? murmura t-il, en appui sur ses mains juste au-dessus d'elle.

Il jubilait, en vérité. Ses yeux couraient tour à tour vers l’azur de son regard et ses seins soulevés de soubresauts délicieux. Oscar, elle, ne pensa ni à acquiescer ou infirmer : plus qu’une toute petite épaisseur de tissu ridicule la séparait de lui, à un endroit fort intéressant ; le trop, pour tout le dire.

Une pensée confuse traversa néanmoins sa conscience.

 

- André…as-tu…as-tu déjà fait l’amour…à une autre ?

- Mais…non voyons ! Que vas-tu t’imaginer !

Il faisait son poids, pourtant qu’il était bouleversant et agréable de l’avoir sur elle, contre elle ! Tout paraissait extraordinairement naturel.

Il s'étendit plus étroitement et l’embrassa, d’une tendresse assumée. Et termina d’un effleurement contre sa joue.

- Tu n’as donc pas encore compris, que je t’aime ? Toi, et pas une autre ? Qu’il ne peut y en avoir une autre…

- A…alors je suis vraiment…la première ?

- Oui, petite folle.

- Parce que toi, tu l’es pour moi…

- Je sais. Tu as peur ?

- Non…enfin si, peut-être un peu, de ne pas avoir peur justement. Je me sens…étrange…cela me donne de drôles de sensations quand je regarde ton…

- Ta verge. Cela s’appelle comme ça. Dis-le, pour voir…

- Verge ?

- Encore…

 

Tout pareillement excitée que lui Oscar obtempéra, en de successifs chuchotements, des soupirs de plus en plus appuyés, un gémissement, une faim commune, quand la main du jeune homme baissait le pantalon de baptiste aussi ténu qu’un voile. Malgré tout elle déglutit malhabilement dès qu’il toucha son sexe, sans même attendre de la débarrasser totalement. Les genoux entravés par le vêtement, elle palpita, se cambra, enserra le cou du jeune homme de ses bras implorants. Elle le voulait tellement ! Mais elle ignorait les gestes, les caresses qu’il prodiguait, lui semblait savoir.

Son frémissement enfla à mesure que la main se faisait indécente. « Viens, viens André…là, j’ai besoin…je veux… »  et quantité de paroles tendres, était-ce seulement possible tant de désir ?

Rien de ce qu’elle connaissait ne pouvait se comparer, d’ailleurs son esprit ne raisonnait plus du tout, porté par le bataillon d’instincts impudiques.

 

Dans un cri de frustration elle se dévêtit complètement, attira un André également pétri de scandales et imprima brutalement le fessier d’une fermeté étourdissante contre ses hanches, pour qu’enfin il se soude à elle, complet.

Il comprit, bien sûr, son envie égale à la sienne ; pourtant il se retint, le corps dur, chaque muscle exprimant l’attirance qu’il avait d’elle.

 

- Doucement, mon dieu…tu veux ma mort, Oscar ! rit-il d’une voix lointaine.

- Pour…

- …quoi, dirent-il ensemble, ce qui les fit rire. Parce que tu me fais perdre tout contrôle, voilà pourquoi, douce folle ! Il est de notoire légende qu’une vierge se respecte, se ménage, se…

- Foutrecul, laisse-donc les légendes tranquilles et possède-moi !

- Bon sang, quelle sagesse…

 

Malgré l’injonction il prit tout de même son temps, transformant Oscar en linge bon à tordre tant l’excitation fut grande de le sentir peu à peu en elle. Aucune douleur insoutenable, ni inconfort notable, de l’émerveillement à l’état brut à la vue du visage d’André, transfiguré, suivit de leurs gémissements communs sous l’effet plus que talentueux du beau fessier. Et le plaisir foudroyant du jeune homme au moment où elle prononçait sans y même penser le mot « verge », à un moment stratégique.

Il se laissa tomber à ses côtés, mouillé  de sueur et saisit aussitôt sa main, fort. Très.

Leurs onomatopées élaborées faites de voyelles une seconde plus tôt furent remplacées par un rire très doux, haché, salvateur, quelque chose d’aussi intime que ce qu’ils venaient de faire.

Au bout d’un long moment de silence André porta les doigts de la jeune fille à ses lèvres, les embrassa.

 

- Il me semble que tu n’aies jamais dormi près de moi de cette façon…

- Ni toi chassé les monstres sanguinaires de la sorte…Du moins pas à ma connaissance.

- Joue les innocentes. Ta fougue était on ne peut plus stimulante.

- Merci…même si je crois bien que les monstres, ce soit nous : faire cela dans le lit de Grand-Mère, quand j’y songe ! Je ne pensais pas ce que c’était si…bestial.

- Déçue ? s’alarma t-il.

- Plutôt…intéressée, je dois dire. Impressionnée, même. Conquise…

 

André se remit en appui, content du double sens de la formule. Il écarta une mèche blonde collée à son front.

 

- Nous pourrons recommencer à chasser nos peurs nocturnes…lorsque l’angoisse sera trop forte.

- Quand ?

- Ton empressement demande réflexion…d’ici quelques minutes ? proposa t-il malicieusement

- Ah, cela me convient ! Je déteste lorsque tu as peur.

- J’approuve. En tout cas, grâce soit rendue à une robe.

- Pardon ? Que veux-tu dire…

- Si cette affreuse robe n’avait pas existée, nous en serions encore à nous casser la figure…

- Affreuse ? Elle n’était quand même pas si hideuse que cela…protesta faiblement Oscar en jetant un regard mélancolique sur le somptueux tas de satin ivoire, traînant sur le plancher.

- Mais qui te parle de la tienne ? Je parle de MA robe !

- Idiot ! éclata t-elle de rire en se jetant sur lui.

 

 

4.

 

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